Dans le cadre des conférences Hygia, co-organisées par l’Académie nationale de Pharmacie et LVMH Recherche, le Docteur Céline Picard de l’Université du Havre a présenté des travaux de recherche récents sur les relations entre le profil sensoriel d’une formule évaluée par un panel expert et sa description par des mesures instrumentales.

Les formulations cosmétiques sont extrêmement variées et complexes. Elles sont destinées à être appliquées sur la peau, organe extrêmement riche en terminaisons sensorielles et en mécanorécepteurs. Le succès d’un produit cosmétique, par exemple un produit de soin de la peau de type crème ou sérum, réside dans les décisions des formulateurs de s’orienter vers un type d’émulsion plutôt que vers un autre. Le secret de la réussite repose donc sur les subtiles combinaisons des ingrédients sélectionnés. Ces ingrédients sont de nature physicochimiques très différentes, eau, corps gras, huiles, polymères, gélifiants, extraits végétaux, poudres, pigments… La définition de la texture d’un produit cosmétique est une notion complexe et multidimensionnelle associant sa composition complexe et les procédés de préparation.

Jusqu’en 2005, seules quelques rares études s’étaient intéressées à la corrélation entre le profil sensoriel d’un produit et ses caractéristiques physicochimiques ou structurales.

Le but de l’analyse sensorielle est d’examiner les propriétés organoleptiques des produits par les organes des sens. Un panel expert prend en charge cette évaluation par des tests descriptifs nécessitant l’utilisation d’un lexique sensoriel commun précisément défini et validé. Parallèlement, des méthodes physicochimiques sont utilisées pour caractériser les textures étudiées et ainsi évaluer les propriétés rhéologiques, mécaniques, structurales et de trouver des corrélations avec leur perception sensorielles via les mécanorécepteurs, les récepteurs tactiles de la peau ou les organes visuels et auditifs.

Les nouvelles recherches présentées dans cette conférence ont permis d’apprécier les progrès effectués dans la définition mathématique des corrélations et la mise en place d’un outil prédictif des propriétés sensorielles de texture, à, partir des mesures instrumentales simples à réaliser.
Cela a été possible par l’étude de l’influence d’un ingrédient ou d’une combinaison d’ingrédients particuliers, par exemple un ou plusieurs polymères en qualité d’agent texturant, sur les propriétés finales de texture d’un produit de soin. Ainsi, il a été possible de qualifier et quantifier des descripteurs tels que la brillance, l’intégrité de la forme, la force de pénétration, la force de compression, le filant, la capacité d’étalement, l’absorption et le collant d’une formule en fonction de sa composition et de son procédé de préparation. L’analyse rhéologique des produits, exécutée à l’aide de différents tests d’écoulement, d’oscillation en déformation et en temps, et de fluage-relaxation, permet à l’expert formulateur de caractériser de manière plus fine le comportement des produits à l’échelle microscopique ; tandis qu’une caractérisation plus macroscopique des propriétés mécaniques des produits est effectuée à l’aide d’un texturomètre, ou en mettant notamment en place divers tests se rapprochant des protocoles d’évaluation sensorielle.
Il est évident que seules des analyses statistiques poussées permettent de déterminer les liens existant entre les diverses données et de définir un modèle prédictif. C’est grâce à ce type de recherches que la cosmétique de luxe est aujourd’hui capable de proposer des créations d’excellente qualité dotée d’une sensorialité perfectionnée.