Rombio (Robust Operations Management for Biotechs) est une spin-off de l’Université catholique de Louvain. Rombio se base sur l’intelligence artificielle et la théorie des probabilités pour générer des plannings opérationnels optimisés, suivant les KPIs, ressources et contraintes de l’entreprise, tout en tenant compte de l’incertitude. Les gestionnaires peuvent suivre et adapter les opérations, en anticipant les bottlenecks et besoins futurs en ressources.

La problématique intrinsèque au milieu des biotechs (et, dans une moindre mesure, du pharma) que nous avons mise en évidence est le manque d’anticipation. Qu’ils soient CEO (D-Tek, CorisBio Concept), responsables d’opérations (Zentech, KEGT, Cellaïon) ou d’innovation (Takeda), voire le procurement (Diasource), ce constat est partagé et la planification ne dépasse pas 3 semaines d’avance. Dès lors, les problèmes apparaissent sans avoir été anticipés. Si le nombre d’opérateurs de production est trop faible, c’est remarqué en dernière minute et le problème est donc résolu dans l’urgence.

Pour planifier toutes ces opérations, Excel est l’outil majeur : flexible et entièrement modulable, cet outil est aussi complètement inefficace. Les changements sont complexes à réaliser, prennent un temps important et n’apportent pas une véritable fiabilité dans la planification ou le suivi. Les responsables d’opérations n’ont aucune garantie de respecter toutes leurs contraintes opérationnelles, et se limitent donc à planifier à très court terme.

Les responsables d’opérations et/ou de départements ne disposent pas d’outils leur permettant de prédire s’ils seront capables d’atteindre un objectif de production sur base des ressources à leur disposition. A fortiori, ils ne peuvent prédire leurs besoins futurs en ressources ou les ressources bloquantes. Ils sont dépourvus d’arguments concrets pour demander ou négocier les investissements auprès de leur management.

Dans certains contextes (les départements QC de grosses sociétés comme KEGT), on ne cherche pas vraiment à maximiser le rendement. Celui-ci est fixé/imposé par la production. On cherche juste à s’en sortir avec le moins de casse possible.Dans ce cas, l’objectif est de minimiser les problèmes potentiels. Excel ne les y aide pas. Leur solution actuelle est, quand ils en ont l’occasion, de laisser 10-20% des opérateurs en backup, parce qu’ils savent qu’ils pourront sauver la mise en cas de souci (mais c’est 20% de ressources sous-utilisées la plupart du temps). Le plus souvent, ils ne disposent pas de ces 20%, et se contentent d’avancer en croisant les doigts.

De l’exploration spatiale à la bio-production

Sous les aspects opérationnels, une campagne de production en biotechnologie n’est pas très différente d’une mission spatiale : elle suit des processus complexes, se partageant des ressources limitées, sujets à des contraintes très strictes, le tout soumis à l’incertitude. Finalement, l’objectif reste bien entendu de maximiser le rendement, qu’il soit scientifique ou de production, bien qu’en garantissant une certaine probabilité de succès, si possible élevée. D’abord développé dans le contexte de la planification d’opérations durant les missions spatiales habitées, Rombio aide maintenant les entreprises biotechs et pharmas à prendre de meilleures décisions, en anticipant leurs problèmes des mois à l’avance.

Innovations technologiques

Rombio est une spin-off universitaire, et qui dit spin-off, dit innovation technologique.

Pas de machine learning, et donc pas besoin d’une quantité de données et d’observations historiques. La technologie d’IA au cœur de Rombio repose sur des modèles probabilistes et des techniques d’optimisation combinatoire, qui ne nécessitent pas plus d’information que celles déjà présentes dans la tête du gestionnaire d’opérations, qui connaît bien son métier.

Interface de modélisation graphique. Elle permet la modélisation formelle du problème, dans son propre contexte opérationnel, en tenant compte des ressources humaines et matérielles. Le langage de modélisation visuelle proposé par Rombio est un compromis entre complétude (modéliser tous les contextes opérationnels rencontrés en bio-production, mais aussi le spatial, l’agro-alimentaire, etc.) et simplicité (plus besoin d’un doctorat pour appréhender la modélisation mathématique).

Planification robuste et fiable. Le moteur d’optimisation embarqué dans Rombio prend en compte l’incertitude temporelle, mais aussi en termes d’utilisation et de consommation de ressources, dans chaque opération faisant partie d’une campagne de production. La technologie sous-jacente est validée par plusieurs publications scientifiques avec la NASA (Jet Propulsion Lab). En particulier, les modèles probabilistes sont appliqués à la gestion des opérations du Rover Perseverance (Mars2020), mais aussi à la planification de futures missions habitées.

Suivez les KPIs: Les plannings sont générés automatiquement, mais également optimisés, en suivant (une combinaison de) plusieurs KPIs possibles, tels que: la probabilité de succès, l’espérance du coût ou du rendement, la qualité, et même le bien-être des opérateurs en minimisant l’espérance du nombre d’heures supplémentaires dues aux déviations.

Un nouveau paradigme de gestion du risque. Rombio rend les techniques classiques, à savoir “what-if analysis” et le “sensitivity analysis”, obsolètes. Dans un article co-publié en 2021 avec la NASA (voir articles [4], [5], [6]), Michael Saint-Guillain démontre que, d’un point de vue théorique, la technique bien connue dite “what-if analysis” est fondamentalement erronée. Elle sous-estime arbitrairement le risque encouru. Au contraire, les modèles probabilistes embarqués dans Rombio sont prouvés de ne jamais sous-estimer le risque. Enfin, pour un planning donné, le “sensitivity analysis” à pour unique but d’estimer sa qualité moyenne lorsqu’il est soumis à l’incertitude (par exemple, dans les durées réelles des opérations). Cela ne nous aide pas à trouver le bon planning! Finalement, en tenant compte de l’incertitude directement à l’optimisation, Rombio propose les plannings qui optimisent leur réponse à une analyse de sensibilité.

Preuves de concept

Rombio a déjà montré son utilité dans plusieurs domaines de production, et de gestion des opérations en général. En particulier dans les entreprises Zentech, Takeda et Cellaïon. Zentech est active dans la production de kits de diagnostic de maladies chez les nouveaux nés. Takeda est une multinationale active dans la production de médicaments. Cellaïon produit des cellules souches. Trois entreprises très différentes, tant en termes de types de produits que de processus de production.

Les preuves de concept en question étant déjà largement présentées dans des publications scientifiques cités en fin de cet article, les conclusions peuvent se résumer comme suit :
a. Même pour des contextes opérationnels complexes, et très différents, un formalisme de modélisation commun existe, qui soit à la fois suffisamment complet et simple à la fois.
b. Pour des problèmes de tailles réelles, les solutions (i.e. plannings) calculées par un ordinateur surpassent en général celles élaborées à la main, par les experts du domaine, et servent de bases solides pour la prise de décision humaine.
c. Les plannings obtenus en tenant compte de l’incertitude surpassent systématiquement ceux optimisés sous des hypothèses déterministes, en termes de fiabilité bien entendu, mais également tout en préservant une large partie du rendement. Ces résultats restent valides même étant donné de mauvaises estimations de l’incertitude.
Les kits de diagnostic chez Zentech: les prix de l’incertitude, et les bénéfices de la robustesse (optimisation du bien-être!)
Les résultats obtenus avec Zentech démontrent l’importance de tenir compte de l’incertitude. Les plannings obtenus avec des techniques d’optimisation classiques se révèlent particulièrement fragiles, surtout lorsqu’une charge réaliste de travail est considérée. En optimisant sous incertitude, en utilisant des modèles probabilistes, la fiabilité (robustesse) des plannings générés augmentent de ~ 2.5% à ~96%. Le coût de cette fiabilité est de seulement ~12% en moyenne, ce qui signifie que les plannings plus fiables sont à peine 12% moins efficaces (mais en théorie seulement !) que ceux n’ayant que 2.5% de chances de réussite. En sacrifiant 12% du rendement maximal théorique (mais inatteignable en pratique), on obtient des plannings plus de 30 fois plus fiables. De plus, les preuves empiriques montrent que la quantité d’heures supplémentaires peut être diminuée de 50 à 60% en moyenne, en utilisant un modèle probabiliste. Rombio réussit à être la première technologie à optimiser le bien-être des opérateurs et managers de production !

Production pharmaceutique chez Takeda: l’analyse de capacité et les investissements
Une preuve de concept avec Takeda Lessines, une usine de production du géant pharmaceutique implantée en Belgique, montre que Rombio peut être utilisé pour optimiser leurs opérations sur le long terme (planification stratégique) et déterminer les investissements en termes de ressources matérielles. En modélisant seulement une partie de leurs lignes de production, le système a permis de prédire le nombre exact de nouveaux équipements à acheter. Des résultats obtenus en seulement quatre réunions. Rombio a également permis de simuler de nouvelles lignes de production, de nouveaux processes, et d’y identifier les futurs bottlenecks. Enfin, il est montré dans l’article que le système permet également de faire toutes sortes de compromis entre la fiabilité et le rendement.

Production de cellules souches avec Cellaïon: planifier avec le vivant
En cell therapy, et en général quand on travaille avec du vivant (bactéries, virus, antibio), le rythme est imposé par le développement des cellules. Par contre, si on choisit mal les moments où certaines opérations sont lancées, on peut vite se retrouver à venir tous les week-ends pour s’occuper des cellules. C’est impossible à prédire sans avoir recours à des modèles probabilistes, tant il y a d’incertitude dans le processus et les étapes de maturation des cellules. L’objectif ici n’est donc pas d’aller le plus vite possible, mais bien de planifier très intelligemment les opérations, de prendre des décisions probabilistes. Dans cette preuve de concept, les étapes clés de la production d’un lot de cellules souches ont été modélisées dans Rombio, et planifiées dans le système en optimisant plusieurs productions de lots en parallèle. Contrairement aux précédentes applications, en plus de la variabilité des opérations, ici la nature impose également son incertitude sur les délais de maturation requis entre les opérations. Rombio démontre ici son aptitude non seulement à calculer des plannings fiables, mais aussi à fournir des solutions ayant différents niveaux de compromis entre le risque et le bien-être des opérateurs.

 

Une mission habitée sur Mars (ou dans l’ISS): des astronautes qui se gèrent seuls
Comme mentionné plus haut, Rombio contribue aussi à la recherche appliquée à l’exploration spatiale. En collaboration avec la NASA et l’ESA, des missions de simulation de séjour habité sur Mars montrent à quel point le système est flexible, permet de décrire et de résoudre des problèmes d’ordonnancement et d’assignation de tâches dans de nombreux domaines scientifiques. À l’heure actuelle, des discussions sont en cours avec l’ESA pour potentiellement tester Rombio sur la problématique de la gestion et l’optimisation des opérations des astronautes européens, dans le module Columbus de l’ISS.

Rombio tiendra une Conférence aux côtés de Takeda lors du Congrès Bioproduction vol.10 Continuum for Biologics des 28 et 29 septembre 2022 au Brussels South Charleroi BioPark

Suivez les KPIs: Les plannings sont générés automatiquement, mais également optimisés, en suivant (une combinaison de) plusieurs KPIs possibles, tels que: la probabilité de succès, l’espérance du coût ou du rendement, la qualité, et même le bien-être des opérateurs en minimisant l’espérance du nombre d’heures supplémentaires dues aux déviations.

Un nouveau paradigme de gestion du risque. Rombio rend les techniques classiques, à savoir what-if analysis” et le “sensitivity analysis”, obsolètes. Dans un article co-publié en 2021 avec la NASA (voir articles [4], [5], [6]), Michael Saint-Guillain démontre que, d’un point de vue théorique, la technique bien connue dite “what-if analysis” est fondamentalement erronée. Elle sous-estime arbitrairement le risque encouru. Au contraire, les modèles probabilistes embarqués dans Rombio sont prouvés de ne jamais sous-estimer le risque. Enfin, pour un planning donné, le “sensitivity analysis” à pour unique but d’estimer sa qualité moyenne lorsqu’il est soumis à l’incertitude (par exemple, dans les durées réelles des opérations). Cela ne nous aide pas à trouver le bon planning! Finalement, en tenant compte de l’incertitude directement à l’optimisation, Rombio propose les plannings qui optimisent leur réponse à une analyse de sensibilité.